Mon rôle,
vous le savez, n'est pas de réécrire l'histoire, mon rôle est plutôt de gérer
l'entreprise en allant de l'avant.
Marie Polet, Présidente, Imperial Tobacco Canada
Limitée, 4 juin 2012
Le témoignage hors du temps de Marie Polet sur les
activités d'Imperial Tobacco Canada Limitée et de sa société mère au
Royaume-Uni s'est poursuivi aujourd'hui au procès montréalais pour recours
collectifs contre les trois compagnies de tabac multinationales opérant au
Canada.
La présidente fraîchement arrivée au pays a continué sur
sa lancée de réponses évasives entamée la veille. La répétition, dans ce cas-ci,
n'aida en rien à la persuasion et le bénéfice du doute qui avait d'abord été accordé
à Mme Polet par le juge Riordan semblait relativement ténu en fin de journée.
Afin peut-être de mettre en évidence l'impact
considérable des tentatives de BAT pour se distancier de son passé en
restructurant ses opérations et en alternant fréquemment ses responsables
nationaux, le procureur Bruce Johnston a questionné Mme Polet sur de nombreux
sujets, ne s'arrêtant que brièvement sur chacun d'entre eux.
Il y eut de bien nombreuses facettes de l'usage du
tabac au Canada pour lesquelles Marie Polet semblait avoir moins d'expertise que
la plupart des autres personnes présentes en cour. Elle n'avait aucun souvenir
ou connaissance de l'accord de 1962 entre les compagnies de tabac pour ne pas se
concurrencer sur la base d'allégations de santé (pièce 154 au dossier de la preuve) ni de
l'intérêt momentané de son entreprise pour la recherche sur les ondes
cérébrales d'enfants de 11 ans ayant commencé à fumer (pièce 412).
Elle ne semblait également pas familière avec la mise en œuvre de la politique
de destruction de documents de l'entreprise. En outre, elle possédait très peu
de connaissances sur les tendances tabagiques canadiennes. Elle ne connaissait pas
les contestations juridiques (en constitutionnalité) lancées précédemment par
ITCL (pièce 75A). Elle n'avait pas entendu parler du rapport récent du Médecin-chef américain portant sur la prévention de l'usage du tabac chez
les jeunes.
Mme Polet est le nouveau visage de BAT au Canada. Depuis
que les présentes poursuites ont été entreprises en 1998 (i.e. la date limite pour
la majeure partie de la divulgation des documents), la société a dû s'adapter
et évoluer. Il ne s'agit plus d'une société cotée en bourse au Canada, mais d'une
filiale en propriété exclusive d'une multinationale. Elle a développé son
marketing en fonction de nouvelles restrictions réglementaires (il n'y avait encore
ni interdiction de la promotion par commandite, des étalages en points de vente
et des termes comme "légère" ou "douce", ni exigence de mises
en garde de santé illustrées en 1998).
Tel que déclaré, le travail de Marie Polet est de mener
l'entreprise de l'avant. En ce sens, son témoignage peut être plus utile pour
réfléchir au comportement présent et futur de l'entreprise que pour redresser
ses torts antérieurs.
Plus
sécuritaire? Non et oui
En 1997, BAT a colligé ses recherches sur les
cigarettes plus sûres (pièce 416) et inclus dans cette liste ses
travaux sur "le développement de produits acceptables à faible teneur en
goudron". Bruce Johnston a utilisé ce document afin de questionner Mme
Polet sur les points de vue actuels en matière de cigarettes plus sûres. Il
semblerait que l'entreprise marche plus que jamais sur la mince ligne entre
"aucune revendication de sûreté" et "aucune admission de
préjudice spécifique."
Lorsqu'on l'interroge sur les cigarettes à faible
teneur en goudron, Mme Polet a déclaré : Il
n'existe aucune preuve selon laquelle les cigarettes à goudron moindre ou même tout
autre type de cigarettes sont plus sûres d'une quelconque façon que les
cigarettes au taux de goudron plus élevé, et a ensuite ajouté de façon ambivalente
: Des études ont démontré que
statistiquement, les fumeurs usant de cigarettes ultra-faibles en goudron tel
que mesuré par la méthode ISO sont en fait moins exposés à la fumée en moyenne que
quelqu'un qui ... fume des cigarettes plus riches en goudron.
La compagnie continue de faire des recherches sur les cigarettes
plus sécuritaires, mais rejette la responsabilité de leur acceptation sur le gouvernement.
Dans les pays que je connais, il serait
contraire à la loi de véhiculer des allégations allant dans le sens que nos
produits sont plus sûrs, a-t-elle déclaré.
Comme hier, Mme Polet a fait référence à BAT comme
étant transparente sur ses activités de recherche, pointant vers leur site Web
de circonstance, www.bat-science.com .
Nous publicisons tout le travail que nous
faisons, dit-elle.
Les travaux se poursuivent au Projet Day visant la
réduction des produits toxiques dans la fumée, ajouta-t-elle, même si ce
travail a déménagé à Southampton (Royaume-Uni) et le lieu de production, en
Suisse. Le procès avait déjà mis en lumière que les documents de recherche
avaient été détruits au Canada, mais c'est le témoignage de Mme Polet qui a permis
d'apprendre que leur infrastructure canadienne de recherche avait également été
entièrement démantelée.
La Cour
d'appel dit non
Le 11 mai, la juge Marie St-Pierre de la Cour d'appel
du Québec a entendu les requêtes d'Imperial Tobacco et de JTI-Macdonald pour faire
appel des décisions du juge Riordan concernant l'admission des preuves. Le 4 juin,
elle a refusé ces deux demandes, expliquant qu'une procédure d'ordre juridique
supérieur n'était pas appropriée dans les circonstances.
Une décision s'est penchée sur la décision du juge
Riordan du 2 mai, évoquée presque tous les jours de procès par les avocats
d'Imperial Tobacco qui continuent de s'opposer à l'admission de preuves pour
lesquelles un auteur ou un destinataire n'est plus disponible. L'autre décision
concernait les soucis de JTI-Macdonald de voir déposés certains documents d'ITCL.
Il n'est toujours pas clair si c'est par grandeur d'âme ou pour des motifs plus
stratégiques que JTI-Macdonald s'est portée volontaire pour faire appel à ce
sujet au nom d'Imperial Tobacco.
Le témoignage de Mme Polet à ce procès se terminait
aujourd'hui. Les vétérans de campagnes pro-santé passées trouveront certainement
intéressante la comparution demain de Bill Neville, qui dirigeait le Conseil
canadien des fabricants des produits du tabac lors de l'élaboration des premières
lois canadiennes sur le tabac. Il est appelé à témoigner pendant au moins deux
jours.
Texte original : Cynthia Callard
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Pour accéder aux pièces au dossier de la preuve ou à d'autres documents relatifs au procès en recours collectif contre les trois grands cigarettiers, il faut commencer par
1) aller sur le site de la partie demanderesse : https://tobacco.asp.visard.ca/main.htm
2) puis cliquer sur la barre bleue Accès direct à l'information,
3) et revenir dans le blogue et cliquer sur les hyperliens à volonté.