Pour accéder aux pièces au dossier de la preuve, lisez les instructions à la fin du message d'aujourd'hui.
Mardi, après l'interrogatoire de Jean-Louis Mercier par Me Philippe Trudel puis Me Maurice Régnier, suivi de l'interrogatoire d'Anthony Kalhok par Me Bruce Johnston et Me Régnier, il ne restait que des cendres froides du mythe dans lequel des cadres d'Imperial Tobacco (Mercier, Descôteaux et Kalhok, à tout le moins) ont pu se complaire trop longuement : celui que leur compagnie avait agi en conformité de demandes du ministère fédéral de la Santé, et plus précisément de demandes d'un ancien haut fonctionnaire, le pharmacologue Alexander B. Morrison, en ce qui concerne le marketing des cigarettes dites douces ou dites légères.
Me Maurice Régnier, qui représente le gouvernement fédéral, à qui les trois grands cigarettiers tentent de faire porter le blâme judiciaire pour leurs agissements, souhaitait depuis des semaines d'avoir l'occasion de rafraîchir la mémoire assoupie ou trop anecdotique des cadres d'ITCL. C'était la première fois hier que l'un des avocats du gouvernement du Canada posait des questions à des témoins à ce procès.
Le procureur Régnier a fait lire à l'ancien chef de la direction d'Imperial une lettre du ministre fédéral Marc Lalonde datée du 16 mars 1976 et adressée à Paul Paré, alors président du Conseil canadien des fabricants de produits du tabac (CTMC) et grand patron d'Imperial. Jean-Louis Mercier a reconnu qu'Ottawa avait effectivement demandé une réduction de la teneur en nicotine des cigarettes, et pas seulement de la teneur en goudron. pièce 50001
Puisque M. Mercier ne paraissait pas encore convaincu de ce qu'était aussi l'opinion du fameux « docteur Morrison », Me Régnier lui a servi deux lettres du haut fonctionnaire qui enfonçaient les clous, datées de 1977 et 1978. (pièces 50002 et 50003)
La lettre du sous-ministre adjoint Morrison d'avril 1977 demandait notamment si l'industrie canadienne ne pourrait pas envisager d'apposer un jour de claires mises en garde sanitaires sur les emballages de cigarettes, comme l'industrie suédoise le faisait alors (déjà).
La contrainte que l'industrie cigarettière canadienne se serait prétendument senti imposée à l'époque de son code d'autoréglementation n'a nullement empêché le président du CTMC de remettre fermement les fonctionnaires à leur place, comme dans ce passage d'une lettre-réponse de septembre 1977: « Nous sommes en désaccord avec ce type d'activité (apposer des mises à garde claires comme en Suède). Les compagnies membres devraient continuer de communiquer de l'information aux fumeurs à propos de leurs propres marques, mais ne peuvent raisonnablement pas être censées d'annoncer ou de promouvoir la notion que les gens ne devraient pas fumer, ou que fumer est mauvais pour vous.» pièce 50004
(M. Paré se trouvait ainsi à dire que les messages ambigus que l'industrie apposait à l'époque sur les annonces étaient loin d'être des mises en garde sanitaires significatives.)
Me Régnier a demandé à Jean-Louis Mercier, chef de la direction d'Imperial de 1979 à 1993, si sa compagnie avait par la suite changé sa politique consistant à ne pas prévenir les fumeurs que fumer était dommageable pour leur santé.
Pas vraiment, a avoué M. Mercier.
Avant d'être achevé par le procureur du gouvernement canadien, le témoin Mercier avait été forcé de faire quelques admissions supplémentaires à l'avocat Philippe Trudel des recours collectifs et à l'avocate Suzanne Côté d'Imperial Tobacco.
C'est ainsi que contrairement à ce que l'ancien chef de la direction d'Imperial proclamait lors de son premier jour de témoignage, des additifs étaient utilisés par sa compagnie au début de son règne (pièce 286).
À l'examen d'une autre pièce (pièce 284), M. Mercier a reconnu que sa compagnie s'intéressait aux « starters » (les fumeurs débutants), et pas seulement aux « switchers » (les fumeurs qui pourraient changer de marque), pour savoir non seulement leur nombre et prédire la taille future du marché (visée admise depuis longtemps), mais pour savoir quel genre de publicité fonctionnait avec eux.
L'interrogatoire de Me Côté a semblé surtout viser à faire admettre par le témoin Mercier que son témoignage valait moins que celui de diverses autres personnes, lesquelles sont comparues devant le tribunal depuis mars, ou seront possiblement appelées à témoigner. Les juristes et le public raréfié de la salle d'audience ont pu avoir l'impression d'assister à la « tactique de la terre brûlée », mais appliquée sans profit une fois la récolte engrangée.
Le juge Riordan a remercié M. Mercier de son témoignage et lui a donné son congé.
Douceur et légèreté
L'ancien spécialiste du marketing chez Imperial de 1975 à 1985, Anthony Kalhok, est revenu devant le tribunal pour répondre à des questions du procureur du gouvernement du Canada, et à questions des autres parties qui leur ont été inspirées par l'examen de pièces versés au dossier de la preuve depuis son témoignage d'avril.
Interrogé dans un premier temps par le procureur Bruce Johnston des recours collectifs, le témoin Kalhok a indiqué que l'utilisation de la référence à la légèreté dans le marketing du tabac remontait aux années 1930 et avait été remis en vogue avec la mise en marché de cigarettes à basse teneur en nicotine et en goudron dans les années 1970.
M. Kalhok a expliqué que l'utilisation du terme « léger » à la suite du nom d'une marque déjà lancée servait à la démarquer des autres variétés de la même marque, et n'était pas une référence à un niveau absolu de goudron ou de nicotine, et même pas une référence à un niveau de goudron et de nicotine comparé au niveau d'une autre marque.
En revanche, comme le témoin devait l'expliquer plus tard au procureur Maurice Régnier, le terme « doux » ne se voulait pas un comparatif, mais une qualification qui était largement utilisée aussi couramment avant qu'après la venue des cigarettes à basse teneur en nicotine ou en goudron.
Quant à l'association mentale entre léger ou doux, d'une part, et basse teneur en goudron ou en nicotine, d'autre part, elle était le fait des fumeurs eux-mêmes. Les cigarettiers aurait simplement profité de cette confusion.
Une chose était cependant restée en travers de la gorge du procureur Maurice Régnier : l'approbation qu'aurait livrée verbalement le sous-ministre adjoint Morrison au marketeur Kalhok, lors d'une rencontre sans autre témoin, à propos de l'usage du mot « léger » envisagé par ITCL avec le lancement de la Player's Light en 1976. (M. Kalhok a évoqué cette rencontre le 18 avril dernier, lors d'un interrogatoire par Me Craig Lockwood d'Imperial Tobacco.)
Me Régnier a mis sous les yeux du témoin la correspondance du sous-ministre Morrison avec le CTMC et la haute direction d'Imperial, une correspondance de 1977 et 1978 qui ramène le souvenir doré de M. Kalhok au niveau de l'anecdote sans grande signification, comme un souriant oasis dans une relation industrie-gouvernement plutôt sèche.
De l'examen des pièces 5005A, 50006, 50009, 50009A, 50009B, 50010 et 50011 ressort que le gouvernement du Canada n'était pas satisfait du flou où l'industrie se complaisait et a demandé, notamment à Imperial Tobacco, de changer son usage du mot « léger ». ITCL a défendu ses positions, y compris sur les conseils du spécialiste du marketing Kalhok, et n'a pas changé sa pratique.
Le juge Riordan a remercié Anthony Kalhok de sa collaboration et lui a donné son congé.
Mardi, après l'interrogatoire de Jean-Louis Mercier par Me Philippe Trudel puis Me Maurice Régnier, suivi de l'interrogatoire d'Anthony Kalhok par Me Bruce Johnston et Me Régnier, il ne restait que des cendres froides du mythe dans lequel des cadres d'Imperial Tobacco (Mercier, Descôteaux et Kalhok, à tout le moins) ont pu se complaire trop longuement : celui que leur compagnie avait agi en conformité de demandes du ministère fédéral de la Santé, et plus précisément de demandes d'un ancien haut fonctionnaire, le pharmacologue Alexander B. Morrison, en ce qui concerne le marketing des cigarettes dites douces ou dites légères.
Me Maurice Régnier, qui représente le gouvernement fédéral, à qui les trois grands cigarettiers tentent de faire porter le blâme judiciaire pour leurs agissements, souhaitait depuis des semaines d'avoir l'occasion de rafraîchir la mémoire assoupie ou trop anecdotique des cadres d'ITCL. C'était la première fois hier que l'un des avocats du gouvernement du Canada posait des questions à des témoins à ce procès.
Le procureur Régnier a fait lire à l'ancien chef de la direction d'Imperial une lettre du ministre fédéral Marc Lalonde datée du 16 mars 1976 et adressée à Paul Paré, alors président du Conseil canadien des fabricants de produits du tabac (CTMC) et grand patron d'Imperial. Jean-Louis Mercier a reconnu qu'Ottawa avait effectivement demandé une réduction de la teneur en nicotine des cigarettes, et pas seulement de la teneur en goudron. pièce 50001
Puisque M. Mercier ne paraissait pas encore convaincu de ce qu'était aussi l'opinion du fameux « docteur Morrison », Me Régnier lui a servi deux lettres du haut fonctionnaire qui enfonçaient les clous, datées de 1977 et 1978. (pièces 50002 et 50003)
La lettre du sous-ministre adjoint Morrison d'avril 1977 demandait notamment si l'industrie canadienne ne pourrait pas envisager d'apposer un jour de claires mises en garde sanitaires sur les emballages de cigarettes, comme l'industrie suédoise le faisait alors (déjà).
La contrainte que l'industrie cigarettière canadienne se serait prétendument senti imposée à l'époque de son code d'autoréglementation n'a nullement empêché le président du CTMC de remettre fermement les fonctionnaires à leur place, comme dans ce passage d'une lettre-réponse de septembre 1977: « Nous sommes en désaccord avec ce type d'activité (apposer des mises à garde claires comme en Suède). Les compagnies membres devraient continuer de communiquer de l'information aux fumeurs à propos de leurs propres marques, mais ne peuvent raisonnablement pas être censées d'annoncer ou de promouvoir la notion que les gens ne devraient pas fumer, ou que fumer est mauvais pour vous.» pièce 50004
(M. Paré se trouvait ainsi à dire que les messages ambigus que l'industrie apposait à l'époque sur les annonces étaient loin d'être des mises en garde sanitaires significatives.)
Me Régnier a demandé à Jean-Louis Mercier, chef de la direction d'Imperial de 1979 à 1993, si sa compagnie avait par la suite changé sa politique consistant à ne pas prévenir les fumeurs que fumer était dommageable pour leur santé.
Pas vraiment, a avoué M. Mercier.
Avant d'être achevé par le procureur du gouvernement canadien, le témoin Mercier avait été forcé de faire quelques admissions supplémentaires à l'avocat Philippe Trudel des recours collectifs et à l'avocate Suzanne Côté d'Imperial Tobacco.
C'est ainsi que contrairement à ce que l'ancien chef de la direction d'Imperial proclamait lors de son premier jour de témoignage, des additifs étaient utilisés par sa compagnie au début de son règne (pièce 286).
À l'examen d'une autre pièce (pièce 284), M. Mercier a reconnu que sa compagnie s'intéressait aux « starters » (les fumeurs débutants), et pas seulement aux « switchers » (les fumeurs qui pourraient changer de marque), pour savoir non seulement leur nombre et prédire la taille future du marché (visée admise depuis longtemps), mais pour savoir quel genre de publicité fonctionnait avec eux.
L'interrogatoire de Me Côté a semblé surtout viser à faire admettre par le témoin Mercier que son témoignage valait moins que celui de diverses autres personnes, lesquelles sont comparues devant le tribunal depuis mars, ou seront possiblement appelées à témoigner. Les juristes et le public raréfié de la salle d'audience ont pu avoir l'impression d'assister à la « tactique de la terre brûlée », mais appliquée sans profit une fois la récolte engrangée.
Le juge Riordan a remercié M. Mercier de son témoignage et lui a donné son congé.
Douceur et légèreté
L'ancien spécialiste du marketing chez Imperial de 1975 à 1985, Anthony Kalhok, est revenu devant le tribunal pour répondre à des questions du procureur du gouvernement du Canada, et à questions des autres parties qui leur ont été inspirées par l'examen de pièces versés au dossier de la preuve depuis son témoignage d'avril.
Interrogé dans un premier temps par le procureur Bruce Johnston des recours collectifs, le témoin Kalhok a indiqué que l'utilisation de la référence à la légèreté dans le marketing du tabac remontait aux années 1930 et avait été remis en vogue avec la mise en marché de cigarettes à basse teneur en nicotine et en goudron dans les années 1970.
M. Kalhok a expliqué que l'utilisation du terme « léger » à la suite du nom d'une marque déjà lancée servait à la démarquer des autres variétés de la même marque, et n'était pas une référence à un niveau absolu de goudron ou de nicotine, et même pas une référence à un niveau de goudron et de nicotine comparé au niveau d'une autre marque.
En revanche, comme le témoin devait l'expliquer plus tard au procureur Maurice Régnier, le terme « doux » ne se voulait pas un comparatif, mais une qualification qui était largement utilisée aussi couramment avant qu'après la venue des cigarettes à basse teneur en nicotine ou en goudron.
Quant à l'association mentale entre léger ou doux, d'une part, et basse teneur en goudron ou en nicotine, d'autre part, elle était le fait des fumeurs eux-mêmes. Les cigarettiers aurait simplement profité de cette confusion.
Une chose était cependant restée en travers de la gorge du procureur Maurice Régnier : l'approbation qu'aurait livrée verbalement le sous-ministre adjoint Morrison au marketeur Kalhok, lors d'une rencontre sans autre témoin, à propos de l'usage du mot « léger » envisagé par ITCL avec le lancement de la Player's Light en 1976. (M. Kalhok a évoqué cette rencontre le 18 avril dernier, lors d'un interrogatoire par Me Craig Lockwood d'Imperial Tobacco.)
Me Régnier a mis sous les yeux du témoin la correspondance du sous-ministre Morrison avec le CTMC et la haute direction d'Imperial, une correspondance de 1977 et 1978 qui ramène le souvenir doré de M. Kalhok au niveau de l'anecdote sans grande signification, comme un souriant oasis dans une relation industrie-gouvernement plutôt sèche.
De l'examen des pièces 5005A, 50006, 50009, 50009A, 50009B, 50010 et 50011 ressort que le gouvernement du Canada n'était pas satisfait du flou où l'industrie se complaisait et a demandé, notamment à Imperial Tobacco, de changer son usage du mot « léger ». ITCL a défendu ses positions, y compris sur les conseils du spécialiste du marketing Kalhok, et n'a pas changé sa pratique.
Le juge Riordan a remercié Anthony Kalhok de sa collaboration et lui a donné son congé.
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Pour
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des cigarettiers devant la Cour supérieure du Québec, il vous faut
1- d'abord aller sur le site des avocats des recours collectifs à https://tobacco.asp.visard.ca ;
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