Jeudi, au procès en responsabilité civile des trois principaux cigarettiers du marché canadien, l'avocat Simon Potter, qui représente Rothmans, Benson & Hedges, la filiale canadienne de Philip Morris International, a contre-interrogé, en français, l'expert médical en dépendances des recours collectifs, le Dr Juan Negrete, psychiatre de son état.
Imperial Tobacco Canada prévoit aussi de contre-interroger le témoin-expert, lors d'un jour d'audition du procès qui aura lieu en avril, vraisemblablement le 3.
Une prochaine édition du blogue reviendra sur les difficultés (pas nécessairement insurmontables) que représente la mesure du phénomène de la dépendance et que Me Potter a examiné avec le Dr Negrete.
Les auditions sont maintenant suspendues jusqu'au 2 avril.
Outre le retour à la barre des témoins du Dr Negrete, on attend durant cette semaine celui de Jacques LaRivière, le grand manitou des relations publiques au Conseil des fabricants de produits du tabac (CTMC).
2 Enfin en ligne
L'édition de ce blogue relative à la 129e journée du procès est enfin en ligne.
Pour les internautes qui l'auraient déjà lu, il peut être important de prendre connaissance d'un oubli, maintenant corrigé, que l'auteur du blogue a commis. Le bref moment le plus intense de la prise de becs relaté dans cette édition-là est survenu À UN MOMENT OÙ LE JUGE N'ÉTAIT PAS ENCORE DE RETOUR DANS LA SALLE D'AUDIENCE, lors d'une petite pause qu'il avait accordée. On ne le trouvera donc pas dans la transcription des auditions du tribunal.
3 Les avis du juge Riordan au sujet de la langue des interrogatoires
Mercredi, voici ce que le juge Brian Riordan de la Cour supérieure du Québec a déclaré pour clore le court mais vif débat sur la possibilité que le témoin du jour doive légalement être interrogé en anglais pour accommoder les plans de la partie défenderesse et une avocate:
C’est une situation qui n’est pas censé arriver. La Charte
de la langue française oblige les avocats à être à l’aise en français. Je suis
tout à fait sensible à l’idée d’être respectueux et accueillant pour nos amis d’Ontario,
ils sont toujours les bienvenus ici, aussi longtemps qu’ils sont proprement
qualifiés suivant les règles en vigueur ici, et l’une de ces qualifications est
qu’ils soient capables de parler français. Ce n’est pas un reproche pour quelqu’un
qui ne peut pas parler français, mais c’est une des règles du Québec qu’un
avocat doit être capable de se débrouiller suffisamment en français. Il y a des
tests qui sont administrés quand vous sortez de l’École du Barreau pour s’assurer
que la personne peut parler français
C’est une situation qui est singulière, pour dire le moins,
qu’un témoin qui souhaite témoigner en français au Québec se fasse demander de
ne pas le faire.
Je vais autoriser le témoin à témoigner en français, mais je
vais suspendre, si vous le désirez, durant le temps pour vous de trouver un
interprète pour venir ici.
(traduction de l'auteur du blogue à partir de la transcription du 20 mars 2013)
Jeudi, le magistrat en a remis une couche.
C’est la dernière fois que je vais tolérer d’accommoder un
avocat qui ne peut pas parler français. Je dis cela sans reproche, mais c’est
le Québec et nous avons des lois ici et nous avons des coutumes ici, et je ne
vais pas tolérer cela encore. Je l’ai fait hier in extremis, mais je ne vais
pas le refaire.
(traduction de l'auteur du blogue à partir de la transcription du 21 mars 2013)
*
Avant
d'applaudir à la fermeté des principes, il faut cependant s'attarder à
quelque chose d'autre que le juge a dit jeudi, en s'adressant au
procureur Philippe Trudel des recours collectifs, mais en présence du
témoin:
Le problème que j’ai est le suivant. Je suis en train de regarder le
curriculum vitae du Dr Negrete et je vois Université de Toronto et McGill,
partout. Maintenant, je respecte pleinement le désir de quiconque de témoigner
en français ou en anglais et je vais protéger cela, mais là où il semble que …
ce qui apparaît, à tout le moins en surface, c’est qu’il serait indifférent au
témoin, je penserais qu’il serait utile
que peut-être, si vous êtes en train de poser des questions en français, il
puisse y répondre en anglais et en français, mais là où … par exemple, Me
Potter peut l’interroger en anglais. Je suis en train de regarder ses
publications (celle du Dr Negrete), et il y en a quelques unes en espagnol et
en français, mais il y en vraiment plusieurs en anglais et je … il me semble
que ce témoin est polyglotte et que ce ne serait pas difficile… Je peux
comprendre qu’une réponse soit dans une langue différente de celle de la
question, mais si la question est en anglais, comme cela l’était lors du
contre-interrogatoire de qualification comme expert, cela aiderait s’il pouvait
répondre en anglais.
(traduction de l'auteur du blogue à partir de la transcription du 21 mars 2013)
Il n'est peut-être pas sans intérêt de souligner que le public
de la salle d'audience a généralement vu l'honorable Brian Riordan plus à
l'aise et finir plus facilement ses phrases.