mercredi 20 mars 2013

128e jour - Fin du séminaire d'épidémiologie (19 mars)

Alors que le printemps semblait en voie de s'installer la semaine dernière dans la vallée du St-Laurent, une épaisse couche de neige fraîche est venue recouvrir les campagnes et les villes du Québec depuis le début de la semaine.

Le contraste météorologique est cependant moins remarquable que celui qui pouvait s'observer lorsqu'on assistait aux journées du lundi 18 mars et du mardi 19 au procès en responsabilité civile des cigarettiers canadiens au palais de justice de Montréal.

Autant la journée de lundi était du genre à décourager les gens de venir dire ou entendre toute la vérité et rien que la vérité dans un procès, autant la journée de mardi a offert l'image rassurante d'avocats de la défense de l'industrie qui arrivent à concilier la recherche des possibles failles ou faiblesses dans un rapport d'expertise de la partie demanderesse avec un procédé interrogatoire qui a aussi pour effet d'éclairer le juge, les parties et le public sur une matière compliquée. Les avocats de JTI-Macdonald Guy Pratte et Kevin Laroche étaient remarquablement préparés.

La 128e journée (mardi 20 mars) a donc été la digne et agréable suite de la 118e journée et des autres journées de comparution du professeur Jack Semiatycki de l'Université de Montréal devant le juge Brian Riordan.

Au terme de tout ce long exercice, l'épidémiologue québécois n'a cependant pas admis qu'il fallait réviser les conclusions de son rapport d'expertise (voir notre édition relative aux 115e et 116e journées).

Il concède que ses estimations d'un nombre de cigarettes fumées au-delà duquel un fumeur a plus de 50 % de probabilité que le tabagisme soit la cause de sa maladie (une des quatre maladies nommées dans le jugement autorisant les recours collectifs) pourraient être légèrement relevée en fonction de quelques paramètres changés.

(Les quatre maladies sont, souvenons-nous : le cancer du poumon, le cancer du larynx, l'emphysème et le cancer de la gorge, défini parcimonieusement comme l'oropharynx et l'hypopharynx seulement.)

Cependant, étant donné l'exposition totale à la fumée de tabac observée dans les réponses données par les patients aux questions posées par les cliniciens qui ont établi le diagnostic, très peu de ces fumeurs victimes d'une de ces maladies ont consommé une quantité cumulative de fumée de tabac (mesurée en paquets-années) assez basse pour que le léger relèvement du seuil de consommation minimal estimé disqualifie un grand nombre d'entre eux pour d'éventuelles indemnités. Plus de 90 % de ces fumeurs malades (ou leurs héritiers) recevraient un dédommagement compensatoire si les cigarettiers sont jugées coupables.


Pour le professeur Siemiatycki, le tabagisme augmente tellement plus le risque d'être touché par une des quatre maladies que d'autres facteurs de risque comme la consommation d'alcool ou l'exposition à l'amiante, par exemple, que c'est comme de comparer la hauteur du mont Everest à celle du mont Royal, en se demandant « lequel ferait le plus d'ombre à l'autre ». Il n'est pas nécessaire d'utiliser un instrument de mesure finement gradué pour tirer une conclusion pratique, selon l'expert.

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Aujourd'hui, mercredi, le tribunal a commencé d'entendre le témoignage du Dr Juan Carlos Negrete, un psychiatre expert du domaine de la dépendance, qui a enseigné à l'Université McGill durant plus de 40 ans et fait de la clinique à l'Hôpital général de Montréal, pas loin de là sur les flancs du mont ...

Royal. Bonne réponse.

Notre prochaine édition racontera les faits saillants de cette 129e journée.