Mais Noël est aussi évidemment l'époque de l'année où les journalistes qui ne l'ont pas fait plus tôt recommandent des lectures livresques en rapport avec le domaine des activités humaines qu'ils se sont chargés d'observer. À l'occasion, les suggestions concernent aussi le Septième art.
On ne dérogera pas ici à cette puissante tradition.
Bad Acts, par Sharon Eubanks, avec une préface par Stanton Glantz
Le ministère de la Justice a obtenu en 2006 le verdict de condamnation recherché, mais ce verdict était assorti d'une sentence presque insignifiante.
Le récit de Me Eubanks nous fait remonter jusqu'au moment où le président des États-Unis Bill Clinton, lors de son discours de janvier 1999 sur l'état de l'Union, a annoncé le lancement de la poursuite.
Dès le départ, les avocats salariés du ministère de la Justice durent composer avec la possibilité de devoir céder la gestion de l'action à des avocats externes.
Puis, le gouvernement Bush succéda au gouvernement Clinton en janvier 2001, et une série d'autres difficultés survinrent (voir l'interview de Mme Eubanks à CBS en 2007)(et à Fox), qui s'ajoutaient aux défis prévisibles et imprévus d'une poursuite d'une telle ampleur contre des compagnies habituées de se défendre.
Les particularités de fonctionnement du système judiciaire américain font en sorte qu'un lecteur étranger, à plus forte raison s'il n'est pas avocat, peut être un peu confondu par moments. Le texte gagnerait aussi par l'ajout d'intertitres et par l'étalement du contenu sur un plus grand nombre de pages.
Mais les bons côtés l'emportent sur les mauvais. Ainsi, l'auteure apporte au lecteur, tout au long du récit, un luxe de détails qui ont pour effet de donner à sa relation des événements une vraisemblance psychologique et sociologique remarquable.
L'avocate a aussi l'habileté de conclure plusieurs chapitres sur un suspense, qui fonctionne même si vous êtes grosso modo au courant de la fin de l'histoire.
Un jour, un scénariste d'Hollywood en fera peut-être un film.
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Tabac, la conspiration, par la cinéaste documentariste Nadia Collot
reconstitution de la réunion de hauts dirigeants de l'industrie du tabac à l'hôtel Plaza de New York en décembre 1953 |
Une conspiration prouvée devant la juge Kessler |
Devant le juge Riordan en novembre, le professeur Proctor avait donné une date de naissance à la conspiration, 1953, une date que la juge américaine Gladys Kessler, dans son jugement de 2006, a aussi retenue pour dater le début de ce que la justice américaine appelle « the Enterprise » (voir entre autres à la page 18 du jugement Kessler).
Certains passages du film de Nadia Collot témoignent du passage du temps et des lois, comme cette scène où la co-fondatrice de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac, Heidi Rathjen, achète des cigarettes à une jeune vendeuse dans une discothèque. C'était à peine hier.
Aux dernières nouvelles, les Gérard Dubois (France), Pascal Diethelm (Suisse) et Inoussa Saouna (Niger), de même que les Garfield Mahood, Éric LeGresley et Heidi Rathjen (Canada), sont fidèles à leur poste de surveillance et de combat, puisque les cigarettiers continuent de se refaire constamment une santé à même celle de cette part substantielle de la population qui reste accrochée à leurs produits. (clin d'oeil 2011)
fiche de La Conspiration sur le portail de l'Office national du film du Canada avec une liste d'endroits où trouver le film
entrée consacrée à La Conspiration sur l'encyclopédie en ligne Wikipédia, avec des hyperliens utiles
Le maître du jeu, par le romancier John Grisham
Nous parlons ici d'un roman, paru en 1996, où il n'y a rien de mentionné par simple scrupule de faire justice à des faits de la petite ou de la grande histoire. Il s'agit d'une œuvre où les effets sont brillamment calculés, un thriller dans la meilleure tradition du genre. Si vous devez vérifier par vous-mêmes pourquoi Grisham est si populaire, autant faire votre vérification avec ce roman plutôt qu'avec un de ses nombreux autres.
C'est l'histoire d'un jury de 12 simples citoyens triés sur le volet par les deux parties, un jury où se retrouve un juré en mesure d'influencer le verdict et qui offre aux parties de faire cela en échange d'argent.
Le procès est celui d'une poignée de compagnies de tabac à qui sont réclamés, par la succession d'une victime de cancer du poumon, un dédommagement compensatoire de 2 millions $ et une peine de 400 millions $.
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Dans le film du même nom (1999), Hollywood a transformé les cigarettiers en fabricants d'armes et fait les mille ajustements nécessaires. Le film a son mérite, mais il faudrait en faire un deuxième et coller au roman.
Certains cinéphiles prétendent que les cigarettiers ont été remplacés par des fabricants d'armes dans le film à cause d'un autre film, L'initié, sorti trois ans plus tôt (1996), et qui raconte l'histoire d'un cadre et scientifique d'une compagnie de tabac qui s'apprête à révéler des faits déplaisants, et du journaliste-recherchiste Lowell Bergman qui veut le faire passer à la populaire émission 60 minutes du réseau de télévision CBS. À la grande déception du journaliste, la presse écrite new-yorkaise et en particulier le Wall Street Journal se montreront plus rapides et de meilleurs incarnations de la « presse libre ».
L'initié est une dramatisation censée être basée sur des faits vécus, notamment par le témoin de la semaine dernière au procès de Montréal, le biochimiste Jeffrey Wigand.
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On s'étonnera peut-être de ne pas trouver dans ce compte-rendu de lectures et de visionnements la présence de Golden Holocaust de l'historien Robert Proctor, mais ce n'est peut-être que partie remise.
Dans le corridor du palais de justice en novembre, M. Proctor disait à votre serviteur le plus grand bien du livre Merchants of Doubt de Naomi Oreskes et Erik Conway. Ce reportage de l'Agence Science Presse consacré au livre d'Oreskes et Conway attire l'attention sur le recyclage de la stratégie de relations publiques de l'industrie du tabac dans une entreprise de négation de la réalité des changements climatiques sur la planète.
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Lors de sa comparution devant le juge Riordan, et dans son rapport écrit d'expert, l'historien Proctor a reproché au rapport d'expert de son confrère historien Robert Perrins, rédigée à la demande des cigarettiers canadiens, d'avoir attribué à un doute scientifique l'abstention de l'Association médicale américaine (AMA) de se joindre au début des années 1960 au consensus scientifique sur la relation de cause à effet entre le tabagisme et le cancer du poumon et d'autres maladies.
Perrins aurait dû, selon Proctor, consulter les documents internes des cigarettiers pour comprendre facilement la motivation en réalité corporatiste de la principale organisation du corps médical. L'AMA était opposée aux plans d'assurance-maladie publics qu’échafaudaient régulièrement des députés au Congrès. S'adresser au grand public peut coûter cher, et l'industrie du tabac a été généreuse en appuis. L'AMA a longtemps retourné l'ascenseur.
Annonce de 1949 visible sur le site de l'Université Stanford |
(Si vous avez une demi-heure, vous pouvez écouter l'allocution endisquée de l'acteur, datée de 1961. Les avocats n'ont pas le monopole de l'art oratoire.)
Il y a toutes sortes de manières de souhaiter un joyeux Noël à ses proches et à ses amis.
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